Pscychopathologies : psychose et névrose


La psychopathologie névrose et psychose 

Dès le début de ses recherches psychiatriques, en 1908, .Jung observe que la maladie mentale est affaire de dissociation, c'est-à-dire que le rapport entre le conscient et l'inconscient est déficient. 

La maladie est la signification d'un désaccord avec soi-même et elle exige que l'on rétablisse l'équilibre. 

En d'autres termes, le rapport du moi au Soi est capital dans la psychologie analytique. Déjà en 1916, Jung décrit la relation du moi avec l'inconscient dans un livre ayant pour titre: Dialectique du moi et de l'inconscient. Ainsi, à l'époque, il définit le Soi comme «Dieu en nous» et dans ce même ouvrage, quelques pages plus loin, il définit le processus d'individuation au cours duquel le moi est subordonné à l'instance supérieure du Soi. Il décrit ce moi comme étant devenu « l'objet d'un sujet qui l' englobe ».

Autant chez l'individu sain que chez .celui atteint d'une pathologie, comme nous le verrons plus loin, l'essentiel de la démarche vise le .dialogue avec l'inconscient et surtout l'assimilation de ses contenus. 

L'étude des maladies mentales propose déjà le programme philosophique de Jung sur les opposés. Citons d'ailleurs , comme révélateur de sa quête du divin, le passage suivant tiré d'une lettre du 28 août 1945 : « Ce qui m' intéresse avant tout dans mon travail n'est pas de traiter les névroses mais de me rapprocher du numineux... l'accès au numineux est la seule véritable thérapie. » Correspondances

Jung se demande comment s'opère le dialogue du conscient et de l'inconscient lorsqu'il y a pathologie chez un individu. Le caractère antinomique de l'énergie psychique s'écoule bien autrement chez l'individu souffrant d'une névrose que chez le psychotique. 

Dans le cas d'une névrose, nous assistons à une tension extrême des processus psychiques. Celui qui en souffre ne s'ouvre pas suffisamment à l'inconscient. Le manque d'écoute, d'accueil ou de réceptivité envers son propre monde intérieur, amène inéluctablement une dissociation. Il y a chez ce sujet un refoulement conscient ou non de ce qui monte en lui. Ainsi sa conscience s'oppose, se dissocie , plutôt que de s'associer à l'inconscient, provoquant alors une forte tension due aux énergies contraires. 

Chez l'individu souffrant d'une psychose, par contre, le scénario est tout autre. En fait, l'inverse se produit au niveau des processus psychiques. Entre les opposés, c'est une absence de tension qui amène la pathologie. Si le névrosé est dissocié de son inconscient, l'individu schizophrène par exemple est, lui, relié à l'inconscient mais d'une manière pathologique. Des contenus archétypaux le submergent. Des fantasmes l'assaillent et le malade n'arrive pas à les assimiler. On parle alors de délire psychotique qui signifie la perte de contact avec le réel. 

Ainsi, il y a absence de tension parce que ,l'individu n'offre pas de résistance à l'inconscient. Ayant généralement un moi faible et passif, le sujet psychotique se voit dominé par un complexe archétypal. Soulignons ce fait important que l'univers symbolique d'une personne atteinte de psychose ne diffère pas essentiellement de celui de l' homme dit normal. Jung découvre l'inconscient collectif et ses archétypess au contact d'individus schizophrènes de même que chez l'homme sain d'esprit. Parallèlement, il constate que les mêmes contenus psychiques peuplent l'imaginaire humain, en général, comme en fait foi le monde de la mythologie. 

Il n' y a donc que l'attitude qui varie d'un sujet à l'autre. Le pas décisif, une fois de plus, réside dans l'intégration, c'est-à-dire dans la compréhension du sens symbolique des contenus inconscients et aussi de la place accordée dans chacune de nos vies, à l'adoption d'un comportement conséquent avec ce que dicte l'inconscient. 

La psychopathologie mystique ou psychotique 

Lorsque Jung fait sa traversée de l'inconscient, entre 1912-1916, il risque la psychose à tout moment. Ne dit-il pas qu'il est vital pour lui de donner forme à l'émotion à l'aide de différents médiums tels que le dessin, l'écriture et la sculpture, sans quoi celle-ci risque de le dominer, de troubler sa paix intérieure et même de l'écraser psychiquement. 

Bref, il y a très certainement une parenté entre la psychose et la mystique puisque c'est le même Dieu qui nous rend fou ou nous guérit. Par contre, selon nous, on ne peut enlever à l'âme sa liberté ou sa capacité de trouver l'attitude appropriée. Il est de la responsabilité de chacun de bien gérer son rapport au divin mais ce n'est certainement pas Dieu qui entraîne une pathologie. 

Ainsi, les anciens savaient que le danger nous guette et qu'à tout moment, une communion au divin peut se transformer en une démence. Quelle curieuse affirmation! Cela est peut-être juste mais le contraire est possible aussi. N'est-ce pas plutôt la séparation d'avec Dieu qui amène l'aliénation? 

Le préjugé commun des thérapies veut qu'il y ait guérison en éliminant, en compensant ou en corrigeant un manque. Nous sommes influencés par ces modèles de croissance. On vise une restructuration de la personnalité selon un schéma de base correspondant à une norme sociale. Mais cela est-il souhaitable; est-ce que cela répond aux exigences de la psyché propre de l’individu ? 

Intelligence et honnêteté sont à prioriser, disait Jung, dans un cheminement tel que l'individuation. Plutôt que de corriger des manques par rapport à un modèle idéal, dans bien des cas, il s'agit de trouver des moyens permettant d'accepter et d'assumer un destin bien 'particulier. Jung disait à ce sujet, dès 1934 : « Ce que le malade doit apprendre, ce n'est pas comment on se débarrasse d'une névrose, mais comment on l'assume et la supporte ». 

Chez certains psychotiques créatifs, observe Françoise 0' Kane, l'on a observé une diminution de leur créativité lorsqu'ils retrouvaient une certaine normalité. Dans le phénomène de la psychose, le moi est brimé, mais n'est-ce pas en partie la même dynamique chez le névrosé ? En fait, dans les deux cas, ne s'agit-il pas de trouver une relation adéquate avec les aspects d'ombre en nous ? 

,Jung écrivait en 1939 : « Ce n'est pas la névrose qu'il s'agit de guérir, c'est elle qui nous guérit ». Ce n'est probablement ni en réprimant leurs affects, ni en leur imposant une normalité que les patients guérissent. La seule voie qui s'impose est d'aider ceux-ci à intégrer ces aspects d'eux-mêmes dans l'ensemble de leur personnalité. 

« La psychonévrose, en dernière analyse,  est une souffrance de l'âme qui n' a pas trouvé son sens. C'est de la  souffrance de l'âme que germe toute création spirituelle... Ce qui soulage l'homme souffrant, ce n'est jamais ce qu'il s'imagine lui-même, mais seulement une vérité qu'il ressent comme supra-humaine, comme révélée, et qui l'arrache à son état de souffrance. »  Jean Désy, Âme, foi et poésie

« Au milieu de cette maison de fous, je suis ma propre voie intérieure. Au milieu de ce chaos, de cette détresse, je vis selon mon rythme et puis m'absorber à tout instant dans ce qui m'importe vraiment. Ce n'est pas que je me ferme à la souffrance qui m'entoure ou que je m'endurcisse. Je supporte tout très bien et conserve tout en moi, mais je vais imperturbablement mon chemin. » 415 Etty Hillesum, Une vie bouleversée 

D'après la thèse de LUC BEAUBIEN  


L'EXPÉRIENCE MYSTIQUE SELON C.G. JUNG 
La voie de l'individuation ou la réalisation du Soi 
Thèse présentée à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval dans le cadre du programme de doctorat en philosophie pour l'obtention du grade de Philosophiae Doctor (Ph.D.) 
F ACUL TÉ DE PHILOSOPHIE UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC 
2009 


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